Lettre à l’absente – Michèle RUFFIN

Lettre à l’absente

“Le grand vide est fait pour être remplacé.”
C’est bien là ce que tu, toujours, lui répétais
sans autoriser aucune ambiguïté
L’été terminé, et le soleil envolé
Il est las, là tel un jouet cassé, jeté
Plus qu’à tout, pour lui, encore, recommencer.

L’éléphant bien désemparé tire un trait
Lui faudra t-il ses joyeuses années archiver
Les classer tel un papier, un vieil objet ?
L’ œil subrepticement de la trompe essuyé
Il rumine, aligne ses candides pensées.
Non, pas de rancœur, d’abord c’est quoi l’amitié
Un court instantané, simplement partagé ,
Moment – illusion créé, se sentir aimé
Ou souffrir seul de la nostalgie du passé.

Il sourit ; le vide, juste là pour être comblé !
Ne l’as tu pas rien qu’un peu trompé, abusé,
Un éléphant naïf énormément trompé
voilà le gros éléphant qu’il se sentait !
Le vide, l’absence est un gouffre sacré
Qui t’appelle, te harcèle pour rappeler
qu’on ne peut justement rien mais rien oublier.

Comme le Petit Prince tu l’a apprivoisé
et pareil au Renard, tout seul il est resté
Toute à toi dans tes rusés projets d’envolée
Préoccupée à tout quitter, déménager
Ton bleu regard l’a – t -il seulement effleuré ?
Pauvre animal révolté, abandonné !
“Donner, c’est donner et reprendre c’est volé”
Toi, sans te retourner, tu as tout emporté
et n’a rien laissé qu’un éléphant abîmé.


Vers le grand troupeau l’éléphant s’en est allé
Désire- t- il seulement vraiment s’intégrer
Le vide il en fera son unique allié
Dans son éternelle quête de l’amitié.
Recommencer : Si solitude existait,
les gris éléphants le sauraient et barriraient !

 

© Michèle RUFFIN -octobre 2001 – États d’âme “Lettre à l’absente”

Bon anniversaire Sylvie